Désolé pour le pavé, c'est un peu long à lire, mais j'aime bien la prose...à propos du Rallye donc....
:):)
"...Petite réflexion personnelle: pourquoi tant de haine à l'égard de l'un des avions légers les plus réussis de l'histoire, qui n'avait finalement comme défaut que d'avoir été pensé et construit par des spécialistes de l'aviation lourde, peu regardants à la dépense ni encombrés de soucis de simplicité?
Le Rallye, avec ses becs, ses volets ahurissants d'efficacité, ses gouvernes d'une incroyable puissance, son aérodynamique trompeuse (on s'est longtemps gaussé de ses allures de porte de grange volante) mais en réalité optimisée pour le vol sinon lent, du moins peu rapide, avec son train d'avion embarqué (roues tirées, la solution la plus coûteuse, s'il vous plaît), sa grande cabine à la visi totale, ce bon vieux Rallye est sans contestation possible un chef d'oeuvre dans le genre Land Rover volante. Les versions plus puissantes, avec quelques joliesses esthétiques et un bel intérieur, frisaient même la Range Rover et j'ai le souvenir de somptueuses traversées de la France, des Pyrénées jusqu'à Paris, qui avaient des airs de flâneries paisibles et qui, pourtant, à l'arrivée, n'avaient duré qu'une demi-heure (de plaisir) de plus que le même trip en avion-cabine américain, construit souvent manière boîte de conserve (spamcan, terme utilisé pour définir la construction typique US d'avions légers des années 60/70, par la presse américaine elle-même).
Un beau Rallye 235, joliment retapé, une paire de casques modernes sur les oreilles et une solide paire d'Oakley, et vous voilà outillé pour parcourir en vrai gros triplace (trois solides, leurs bagages, et de l'essence pour des étapes de deux heures plus les réserves, soit de quoi voyager idéalement en Europe) des étapes que les qualités de cet avion étonnant vous permettront d'apprécier à leur vraie valeur, en particulier dans le domaine de l'observation du monde qui défile tranquillement sous les ailes. Et avec ses qualités d'atterrissage et décollage très courts, même sans être un Maurice Sérée (pilote d'essai du Rallye), il n'existe pas en Europe un seul terrain qui vous résiste.
Quand à la durabilité... Il n'y a qu'à constater la carrière de remorqueur assumée bravement par ces avions pas vraiment étudiés pour ça au départ pour tirer son béret, et l'abaisser bien bas devant ce mal-aimé qui a pourtant donné des ailes à des dizaines de milliers de pilotes français, sans en faire de mauvais aviateurs au contraire, et surtout sans les casser trop fréquemment.
Et j'ai des souvenirs délicieux d'approches très lentes sur des pistes de brousse, avec 1600/1800 tours, tous volets et becs dehors happant les filets d'air, cramponné au dicton "le manche c'est la vitesse, les gaz c'est la pente", venant finalement impacter tel un appontage dans les tous premiers mètres de bande, et vite les freins, les volets rentrés, et l'incrédulité de constater qu'avec une petite brise, j'avais sans aucun talent particulier stoppé ce qui l'instant d'avant était un avion volant plus vite qu'une grosse auto quand même en l'espace de cinq longueurs de fuselage...
Bel avion!"
Bernard Chabbert, février 2004